Ce n’est qu’un Namaste (3)

Je savais depuis le début – que je n’avais d’ailleurs en fait même pas vraiment cherché – que tôt ou tard ce moment arriverait.

Je l’ai plusieurs fois senti venir ce moment.
Mais il n’était vraisemblablement pas encore temps.

Et voilà, ça y est à présent.

C’est maintenant.

Sur la pointe des pieds, mais sans pour autant hésiter,
Comme j’y étais entrée,
Et après m’y être assez prêtée,
Non sans régulières remises en question de son intérêt,
Je me retire du jeu.

Je m’en retire mais je laisse derrière moi tout ce que j’ai pu y semer ici et là,
Sans jamais particulièrement espérer que ça donne des fruits.
Mais bon, en le souhaitant peut-être un peu quand même… 😀

Les graines plantées croissent ou se meurent indépendamment de la main qui les a portées, puis déposées…
Quoi qu’il en soit, c’est toujours avec beaucoup de joie qu’elles ont été partagées à qui veut bien les recevoir.

Partagées plutôt que retenues pour ne pas se brûler les doigts à les garder seulement pour soi,
Dans la conscience toujours bien présente que l’on peut facilement finir détenu par ce que l’on croit illusoirement détenir…

J’ai toutefois souvent envisagé de tout supprimer. *
Et à vrai dire très souvent.
Même bien avant ce moment.
___
[ Note * : Je pensais alors peut-être développer ici à ce propos, sur l’envers du décor…
Pour résumer, lorsque l’on « produit du contenu » sur un blog / sur Facebook, même si l’intention n’est pas de gagner en visibilité, le fait est que celle-ci devient vite propice à l’exposition à des comportements irrespectueux, dont l’intrusivité fait partie ; mais aussi, entre autres, …
Pour certains, on devient semble-t-il une sorte de potentielle vitrine yogique sur laquelle exposer gratuitement leur publicité ; chers lecteurs, chères lectrices, apparemment vous représentez une source non négligeable de « clients consommateurs de yoga » (vêtements, matériel, « workshops », « retraites », etcetera)…
Pour d’autres, cette « vitrine » peut être allègrement pillée en toute tranquillité, il est si facile de copier-coller des textes ou des parties de textes en « omettant » – ça alors ! – d’en préciser l’auteur et la source…
D’autres encore peuvent même se servir d’un texte pour le publier de façon tronquée dans leur revue imprimée ET commercialisée, sans même prendre la peine de demander évidemment…
Bref. Je m’arrête là. En toute franchise, je n’ai plus envie de consacrer de mon énergie à traiter plus en détail, ici, par écrit, de ce sujet qui demanderait à part entière, tant il y a matière, une analyse sociologique de la marchandisation du yoga. ]
___

J’ai souvent envisagé de tout supprimer (donc),

Mais vos réactions et vos retours – peut-être parce que je ne les ai jamais recherchés – m’ont si souvent touchée que ça m’en a dissuadée.

Savoir que j’ai pu, par mes mots, de loin ou de près, trouver un écho en vous est probablement ce qui a donné le plus de sens à tout cela.

Alors pour l’instant,
Autant tout laisser comme c’est.
En quelque sorte comme une terre en jachère.
On ne sait jamais si un jour ou l’autre je revenais à y semer.

D’ici là ou pas, quoi qu’il en soit, je vous remercie toutes et tous infiniment pour votre accueil toujours enthousiaste depuis presque 5 ans à suivre mon fil que je ne coupe donc pas mais auquel je mets néanmoins un point pour aller tisser la nouvelle trame qui se tend pour moi désormais.

Je vous souhaite le meilleur dans votre pratique,
Puisse-t-elle déborder au-delà – bien au-delà ! – des rebords de votre tapis.
Et surtout prenez chacune et chacun bien soin de votre précieuse vie.

À présent je me retire,
La mienne m’attend. 🙂

***

Ah ! Tout de même avant de terminer, je profite de ce dernier message pour répondre ici à deux questions que l’on me pose beaucoup depuis Ce n’est qu’un Namaste (1)

Le Yoga est entré dans ma vie bien avant de commencer à le transmettre. Si j’en interromps maintenant la « profession » (ce qui ne veut d’ailleurs pas dire que je ne reviendrai pas à donner cours un jour, mais si tel est le cas ce sera autrement), ce n’est donc évidemment pas pour autant que je romps en même temps avec ma pratique. Celle-ci continuera de m’accompagner et d’évoluer avec moi, comme elle le fait depuis le début. Si ce n’était pas le cas, ça n’aurait vraiment aucun sens.

De la même façon, cela fait pratiquement vingt ans que j’écris sans rien montrer jusqu’à ce que je commence à le faire sur Facebook et pour Yoganova magazine avant de le faire ici aussi. Donc non, là non plus, ce n’est pas parce que je ne le donne plus à lire que je vais subitement arrêter d’écrire, ça revient simplement à la sphère privée (avec néanmoins là aussi l’éventualité de partager un jour à nouveau certaines choses si j’en vois l’intérêt).

Autrement dit…
Ce n’est pas parce que ça ne se voit pas (ou plus) que ça n’existe pas (ou plus). 😉

*

Ce qui m’a fait penser, en écrivant cette phrase, que je l’avais en fait déjà écrite quelque part.
Je ne savais plus où, alors j’ai recherché et j’ai fini par retrouver où je l’avais fait naître.

C’était il y a trois an et demi, un jour de nouvelle lune.

En le relisant j’ai trouvé approprié de terminer avec ce texte et, en clin d’œil, d’attendre aujourd’hui – jour de nouvelle lune – pour publier ce troisième et dernier Ce n’est qu’un Namaste. 🙂

(Ce n’est pas parce que ça ne se voit pas que ça n’existe pas)

Nouvelle lune.
Celle qui brille par la clarté de son absence,
Tout en restant toujours présente,
Invisible.

Humilité de s’éclipser sous l’obscurité du ciel,
Infini dans lequel elle se fond,
Lune dans l’Un.

Temps suspendu après avoir cru…
puis décru…

Temps suspendu après avoir expiré…
avant de ré-inspirer…

Le vide qu’il n’est pas nécessaire d’immédiatement remplir.
Le prochain souffle n’est ni à provoquer, ni à guetter, ni même à espérer.
Au petit jour, il sera là, le temps venu, sans avoir eu besoin d’être attendu.

Le rien où toute l’Éternité peut se passer et se placer puisque le temps n’est ni appréhendé, ni estimé, ni même compté.

Tout peut s’arrêter.
C’est là – [silence] – que de l’Essence, le sens apparaît.

Savourer l’apparent inconfort de la vacuité rendu confortable par l’abandon des attentes…
… d’une lumière à allumer et à projeter,
… d’un contenu à contenir et d’un contenant à vider,
… d’une plénitude à fuir ou à capturer.

Et repos.
Repos de s’offrir comme une terre conquise par le Souffle qui s’en va et s’en vient à sa guise.

Et s’arrête.
Suspendu sans même avoir à être décroché.

Nouvelle lune.
Souffle suspendu.
Ce n’est pas parce que ça ne se voit pas que ça n’existe pas ___

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Ce n’est qu’un Namaste (1)

Ce n’est qu’un Namaste (2)


Illustration : Mia Taninaka


24 réflexions sur “Ce n’est qu’un Namaste (3)

  1. Je suis à la fois touchée peinee et heureuse de votre décision. J aurais aimé vous rencontrer mais….cela ne fut pas sauf au travers de vos textes qui vont me manquer. Touchée parce que vous etiez si vraie. Peinee parce que vous ne serez plus là et que je m etais attachée à vous. Heureuse parce que vous avez raison de quitter le yoga mercantile. J y ai aussi souvent songé mais maintenant je pense que le monde du yoga est tout de même l endroit où potentiellement on rencontre de belles personnes. Comme vous. Prenez soin de vous et….ne nous oubliez pas…de temps en temps……ch de Yoga Asana.

    Aimé par 2 personnes

    1. Merci pour votre message Christiana. Oui bien sûr que le monde du yoga est propice à de belles rencontres, comme partout d’ailleurs. Il m’a été néanmoins donné de constater qu’il y a une grande tendance chez les yogis à beaucoup rester entre yogis pour parler de yoga ou de de domaines proches. Je ressentais de plus en plus un sentiment d’étouffer et le besoin d’aérer, ce que j’ai fait, et voilà que je vais maintenant m’envoler. La communauté Yoga est certes d’une grande richesse mais il m’est arrivé d’y ressentir toutefois une forme d’enfermement, ce qui est d’ailleurs assez questionnant alors que le yoga est la voie de la Libération…
      Donc voilà, vient le temps pour moi de sortir encore un peu plus du cadre maintenant, avant de m’y sentir vraiment trop à l’étroit.
      Belle continuation à vous sur votre voie !

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      1. C est un risque effectivement de rester dans cet entre-soi qui etouffe et enferme. C est bien dommage ce paradoxe du yoga actuel. Peut etre que ca changera à un moment donné. Des voix comme la vôtre s elevent. Bon vent de liberté à vous. Petit coucou de temps en temps me ferait plaisir. Vous restez sur facebook en temps que lectrice peut etre? Amicalement. Ch

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      2. Merci beaucoup Christiana. J’avoue que je passe de moins en moins de temps sur Facebook, si je suis très reconnaissante pour certaines rencontres qui m’ont été donné d’y faire, je crois toutefois que le format (qui amène un peu à sauter si vite d’une information à l’autre comme une abeille) me convient de moins en moins. Je laisserai néanmoins ma page ouverte.
        Belle journée à vous !

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      1. Tout à fait d’accord. J’espère juste que le site ne sera pas « détruit ». Tant de beaux mots et tant de belles illustrations, peintures, sculptures… ce serait vraiment dommage. Le côté mercantiles de certains yoga à déplorer, sans aucun doute; heureusement il n’y a pas que cela! Le monde du yoga ne fait que reproduire/copier les travers de notre société de consommation… pour le meilleur 😉 et parfois le pire ;(
        Re-Namasté, Sylvia.

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      2. Soyez rassurée Sylvia, j’ai décidé de renouveler ma souscription à wordpress pour un an (je suis débitée chaque année le 17 juillet pour le renouvellement). Le site sera donc, comme je le dis dans le texte, encore ouvert mais en jachère dans la mesure où je n’y ajouterai pas de nouveaux textes, peut-être plus tard, un jour, mais pas pour le moment en tout cas. Vous pourrez donc continuer de consulter les textes déjà présents. 😉
        Concernant la commercialisation du yoga, si je l’évoque dans ce texte, ce n’est néanmoins pas que cela qui m’a amenée à décider de laisser de côté la publication de textes sur Internet, mais je ne souhaitais simplement pas communiquer à ce sujet.
        Je vous souhaite une belle nuit. Namaste.

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  2. Quelle tristesse de ne plus ressentir l’émoi de la découverte de chacune de vos lignes, l’écho de chacun de vos mots, toutes ces zones d’obscurité qui ont été rallumées par la flamme de votre si belle plume.
    C’est votre décision et je la respecte tout autant que j’admire la belle personne qui se cache derrière l’auteure.
    Et puis comme vous le dites si justement, la graine est semée…
    Il ne me reste plus qu’à vous souhaiter le meilleur, et que de toutes vos pépites naisse une étoile…
    Mille mercis pour ces petits éclats de bonheur.
    Lisa

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  3. Merci infiniment pour vos partages riches et instructifs de la magie de vos mots emplis de poésie et de justesse livré à chaque article. Ils ont fait écho à mon âme et mon cœur. Je vous souhaite amour, paix, Joie sur la voie du yoga que votre Être rayonne sur d’autres chemins dans le partage. Namaste 🙏🥰 Nathalie . Je vous envoie un souffle d’amour et de douceur.

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  4. Bonjour Marie,

    J’ai un profond respect pour votre décision.
    De même qu’un profond regret… Regret? ou le coup de pouce pour aller plus activement à la rencontre, à la recherche de ce vous nous partagiez.
    J’ai un profond respect pour votre sincérité, votre authenticité et générosité.
    J’aime votre posture.
    Je vous souhaite Bonne Route!
    Au plaisir de vous rencontrer.
    Que Dieu vous bénisse.

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  5. Marie,
    Je voulais me poser un peu pour à nouveau t’adresser de profonds remerciements pour tes mots, ta présence (qui a une place plus importante que je ne le croyais, plus consciente du fait de cette belle et dernière séance).
    Aussi Merci à Toi de laisser les mots et les pensées que tu as offerts: ce sera un plaisir et une découverte renouvelés à chaque lecture, ouvrant une voie rendue possible par et au delà des mots sous un jour nouveau. Une façon particulière de penser à toi.
    Également, je repense à l’un de tes textes, laissés en suspens de mon côté car je ne t’avais pas alors livré ma pensée mais ce temps est venu. Il s’agit de celui où tu partageais une fin de séance singulière, que tu ne parvenais pas à décrire précisément. Il est des moments et des rencontres d’une intensité infinie où « l’on sait juste que c’est « sans pour autant pouvoir y mettre des mots (j’y ajoute ceci ce soir – ne l’ayant qu’effleuré jusque là – si ce n’est vaguement que c’est accompli ou que quelques chose à été accompli ou s’est accompli ou produit mais je me dis que c’est même au delà en fait et finalement juste que c’est et que tout est en soi reliés).
    Alors Marie, je te souhaite d’être emplie de moments et de partages où l’on sait que c’est
    … de vibrer et de briller …

    Muriel

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  6. Bonjour Marie, Je pensais venir ce soir pour partager avec tous encore un excellent moment de bien-être, mais j’ai été malade cette semaine et je ne me sens pas encore très bien. Je t’envoie donc toutes mes pensées de partage et je serai avec vous ce soir de tout mon coeur ! Marie, je te souhaite le meilleur, et tout le bonheur et le bien-être possible ! Tu es une si belle personne et poéte et drôle aussi, bref tu vas recevoir en retour tout le bonheur que tu as transmis. En espérant que tu auras encore la possibilité de nous écrire de si beaux textes, je te fais plein de gros bisous et bon vent ma belle 🙂 Nadine.

    Aimé par 1 personne

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