Yoga Sésâme

Chaque fois que tu voudrais être plus loin, plus profond ET plus haut que là où tu es à tout instant, tu te fais disparaître de toi-même, grand absent au présent que tu laisses alors passer sans toi.

La sagesse, la joie, la paix, la liberté, l’amour, l’accomplissement ou que sais-je encore ne sont pas pour un plus tard fantasmé comme les « quand je serai grand » des enfants.

Tout est déjà là, maintenant.

Tant que tu les attends dans l’ailleurs, le plus tard, le miracle, l’impossible, les « j’espère », les « si seulement » et les « peut-être », tu te prives des cadeaux que tu crois devoir ou ne pas mériter.

Alors qu’ils te sont pourtant en permanence offerts, disponibles, gratuitement, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. En toi. Sauf que toi justement tu n’y es la plupart du temps pas, en toi.

En cherchant à s’élever, on se croit cloué à terre.
En cherchant à s’alléger, on se croit lourd et grave.
En cherchant à se purifier, on se croit impur et mauvais.
En cherchant à s’apaiser, on se croit (é)perdu en guerre.
En cherchant à « guérir », on se croit malade ou blessé.
En cherchant à être heureux, on se croit pas ou mal heureux.
En cherchant à être aimé, on croit ne pas l’être ou indigne de l’être.
En cherchant à être soi-même, on se croit pas encore vivant ou bien déjà mort peut-être ?
…

En cherchant la Source et le Ciel, on oublie qu’ils sont là en nous-mêmes.
Et notre quête ne trouve vraiment son sens que lorsqu’elle nous le rappelle.

Et si tout ce que l’on croit manquer nous manquait uniquement par ce qu’on le recherche ?

Et si plus l’on cherchait à atteindre ceci, cela, ici ou là, on ne sait quoi, on ne sait où… et même en soi, et même « Le Soi » en soi… , on s’en éloignait en fait d’autant plus… ?

Réussir, obtenir, devenir… de plus en plus, de mieux en mieux… et après ça, encore quoi ?
Monter encore plus haut, descendre encore plus profond, aller encore plus loin…
Avoir un instant l’impression d’être arrivés et puis se dire que l’on est en fait toujours à côté… et qu’il faut encore « travailler » pour « avancer ».

Mais peut-être que ça suffit d’essayer d’apprendre à léviter pour s’élever jusqu’à atteindre le Ciel.
Peut-être que ça suffit de chercher à creuser, à forer, à sonder de partout pour trouver LA Source, la seule, la vraie.

Ou peut-être que justement si, continuons, et à force de se cogner la tête au plafond, à force de s’enliser les pieds dans la boue, on finira bien par réaliser que Tout ce que l’on espère tant est en nous depuis le début.

Peut-être que le sens de notre quête est qu’à un moment justement elle s’arrête aux limites de l’extérieur pour nous remettre au Sans-limite à l’intérieur.
Là où la Source ni ne se cherche ni ne se tarit.
Là où le Ciel ni ne s’atteint ni ne s’éteint.

Toute quête qui nourrit et fait croître le désir d' »ailleurs », « un jour », dopée par les mirages de paradis irréels, sans nous ramener à chaque fois à la case départ que nous sommes pour nous-mêmes ne fait qu’entretenir l’ignorance cachée sous des visages toujours plus séduisants, nous détournant ainsi de ce qui est notre visage originel.

Celui dans le miroir duquel apparaît le Ciel prenant sa Source au Cœur de nous-mêmes.
Celui à travers lequel l’on peut ainsi reconnaître que ce qui est cherché n’est rien d’autre que ce qui cherche…

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Photo : Yogi on meditation, MorkiRo

Peinture : Aphra Natley