
Alors d’abord est-ce bien nous qui entrons dans la posture ou bien la posture qui entre en nous ?
Sans doute un peu les deux à la fois.
Nous ne pouvons peut-être bien pas vraiment entrer dans une posture si on ne la laisse pas entrer en nous.
Sans cela, plutôt que nous fondre en elle et la laisser fondre en nous de façon concomitante sous l’œuvre magistrale du souffle qui unit le sujet, l’objet et le procédé qui les relie ; sans cela, nous ne sommes peut-être que dans la fuite de ou dans la lutte contre soi pour être autre que ce que l’on est déjà.
N’a t’on jamais pratiqué juste pour ressembler à quelqu’un qui ferait du yoga ?
Où est-on alors lorsque l’on est ainsi hors de soi ?
Selon la manière dont on la vit, la pratique peut parfois être une arme qui se retourne contre nous… Alimentant ce que l’on cherche pourtant à apaiser…
Y a-t-il à forcer, à tirer, à pousser juste pour figurer telle ou telle forme lorsque le sens à tout ça est de contacter le sans-forme au-dedans de soi et donc en tout ?
À travers la pratique posturale, on est amené.e à jouer avec les formes, aussi variées – bien que tout de même limitées – que notre forme nous le permet, faisant ainsi dès lors l’expérience des innombrables manifestations que l’on peut en fait recouvrir et découvrir en une seule : la nôtre.
À la fois un.e et multiple, extraordinaire de l’ordinaire qui, abandonnant un prétendu meilleur ailleurs, s’offre de se révéler au réel qui lui est donné d’incarner.
Si un carré ne peut rentrer dans un triangle (et un veau dans un trou de porte 😅), il peut néanmoins jouer à faire comme s’il en était un, juste pour voir.
Et en faisant ainsi l’expérience de l’altérité, de l’inconnu en nous et de tout l’horizon auquel il nous permet d’accéder, il nous est peut-être ainsi possible de nous reconnaître là où l’on s’ignorait.
Bien conscient.e que nous ne sommes pas cela, donc dans ce cas peut-être pas non plus ceci à quoi l’on s’identifie. Réalisant ainsi que « je suis » suffit.
Liberté. Ça respire.
Enfermé.e nulle part, ni en rien, ni en personne, et même pas en nous.
Un « nous » qui, tant que nous cheminons à le connaître – sur la rive des questions ouvertes plutôt que sur celle de la réponse définitive – n’est jamais figé dans une forme trop étroite pour l’au-delà qui nous habite autant qu’on l’habite.
Comme le mystère du processus de démembrement (où l’on se perd) et de remembrement (où l’on se retrouve) au cœur duquel peuvent se réconcilier et s’allier toutes les paires d’opposés.
« Et » plutôt que « ou », à la fois « hors » et « en », inestimable jouissance du présent insaisissable.
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Photo personnelle : Posture SANS la tête (nan force pas, c’est pas comme ça que ça passera)