Laisser place à l’espace…

Est-ce que dans cette tête pleine à ras bord de tous les « c’est sûr », de tous les « toujours » et de tous les « jamais », y a t’il encore la place pour la surprise émerveillante de tous les « peut-être » laissant le champ vaste à la beauté de l’incertitude inattendue, de tous les possibles qui semblaient jusque là et même au-delà impossibles, de tous les inespérés jaillissant au creux des vagues même les plus désespérées ?

Est-ce que dans cette inspir empressée avant même que l’expir ait justement eu le temps de librement expirer, est-ce que dans cette expir précipitée avant même que l’inspir eût la chance de pleinement s’épanouir, y a t’il la place pour faire danser le ciel en robe de jour ou robe de nuit sur la piste dorée de ces poumons qui sont loin de n’être rien d’autre que des ballons de bal à gonfler et faire éclater une fois la fête terminée ?

Est-ce que dans ce corps dressé comme un soldat de plomb armé jusqu’aux dents de scie d’une énergie tantôt au-dessus du sommet, tantôt au-dessous du plancher, interdit de tomber et privé ainsi de la joie inouïe de se relever (car si l’on ne se laisse pas tomber, comment pourrait-on un jour remonter ?), y a t’il la place pour laisser palpiter un cœur fait pour grandir et aimer bien plus infiniment que toute l’éternité ?

S’il n’y a pas de place pour l’espace – l’espace entre deux pensées, l’espace entre deux respirations, l’espace entre deux mouvements – comment pourrait alors régner l’espace entre deux battements de cœur, berceau dans lequel en se créant elle-même, la divinité donne vie à l’Immortalité qu’il nous est offert d’incarner ?

C’est là,
dans cet espace,
que l’on invite en soi (et autour)
que se révèle la Grâce.
À Sa place.

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Aquarelle : Benjavisa Ruangvaree


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